Stage
de Criel sur Mer du 30 avril et 1er Mai 2011
Château de chantereine
«
Il y avait jadis... »
Cette année-là, le stage de Criel commençait comme
une de ces histoires que l'on contait autrefois pour susciter l'émulation
des jeunes. Fait suffisamment rare pour être noté, le soleil
nous accompagna tout au long de ces deux jours, y compris dans les terres
normandes. On me rapporta pourtant qu'à cinquante kilomètres
alentour de Criel, la pluie n'avait cessé de tomber, comme si
la pluie nous avait été épargnée pour que
Christian sensei put nous dévoiler son art. C'est ainsi que sous
la bienveillance d'Amaterasu, la 7e édition du stage de Criel
prit place. À l'aube du mois de mai de l'année 2011, nous
partîmes donc, onze guerriers du Mitsurukaï, pour les hauteurs
de la falaise de Criel, balayées par les vents marins et par
nos sabres, en quête de savoir et de sensations. Parmi les vétérans,
on retrouvait Éric, mais aussi Françoise et Patrick, toujours
prêts à l'action, Olivia et Olivier, dont l'organisation
sans faille nous fit passer d'agréables moments, ainsi que Sébastien
et Valentina. Mouloud, Samuel et Paul furent donc les nouveaux initiés,
sous la constante attention de Christian.
«
Lorsque votre esprit est en paix, il vous est possible de répondre
facilement aux choses. »
Lorsque nous arrivâmes au lieu-dit, après un voyage plein
de surprises et de convivialité, tout semblait rappeler un passé
onirique : le château du XVIIIe siècle dans lequel nous
avons dormi, les bois voisins que traversait un cours d'eau, jusqu'aux
murmures de la mer. Affichant un calme inébranlable devant les
impérities de la bureaucratie, Christian nous donna là
une première leçon, celle du sang-froid.
Lorsque le cours de Budo commença, nous étions fins prêts.
L'échauffement était articulé autour de jeux de
réflexes, et certains se sont retrouvés dans des postures
délicates et ambiguës. Pendant les exercices de self-défense,
il était difficile par moments de garder son sang-froid, de réagir
avec précision, tandis que des mains expertes tentaient de nous
étrangler. Mais l'ambiance était bon enfant, et les attaques
toujours lancées avec le sourire (ce qui pourrait être
trompeur pour celui qui se défend). Il n'y eut pas de blessés,
et fort heureusement, on n'eut pas recours au shiatsu (pour des coups
mal placés).
Après quelques prises à mains nues pour se dégager,
nous avons poursuivi avec quelques armes, comme le tanto ou le jô.
Pour le lancer de shuriken, nous n'avons pas pu beaucoup nous exercer
à l'esquive, faute de " faux " shuriken : l'idée
d'en lancer de vrais sur ses partenaires avait peut-être le mérite
de mettre fin à des différents personnels, mais le cours
aurait tout de même pris un mauvais tour... Après s'être
ainsi défoulés, ce fut le tour du combat au tonfa et au
shinai. Après trois heures de plaisir à l'état
pur, les armes furent délaissées pour les coups de pied,
histoire de se dégourdir. Enfin, il est à noter que le
stage est l'occasion d'un bon massage pour clore la séance (avis
aux débutants : c'est votre seule chance de vous faire masser
par le sensei ! Venez à Criel !).
La soirée venant, les aïkibudokas troquèrent leur
kimono pour des vêtements moins sportifs, et allèrent voir
le littoral crielien. La marche à pied ouvrit l'appétit,
tandis que certains se laissaient aller au romantisme de ces lieux (n'est-ce
pas Mouloud ? Sans parler des tartes aux pommes qu'on offre aux dames...
Sea, sex and sun !). Ce soir-là, au Coq Hardi, la soupe de poisson
coulait à flot dans nos bols, et les moules venant à profusion
dans nos assiettes pour délecter nos palais, le tout arrosé
de bière. Sur ce, les gens allèrent se coucher, ces souvenirs
pleins la tête et le bokken sous l'oreiller.
«
La voie ne peut être vue ni entendue. Ce qui peut être vu
ou entendu ne sont que les traces laissées par la Voie. Et ce
sont ces mêmes traces qui vous éveilleront à ce
qui ne laisse pas de trace. »
Le lendemain matin, les sabres furent dégainés, et la
mêlée fit rage... ou presque. Des shinai en mains et les
yeux bandés, il fallait réussir à sentir la pression
du partenaire, pour pouvoir l'attaquer dès que la pression n'est
plus là. Adresse et rapidité étaient au rendez-vous,
grâce la nature ambiante apaisante et accueillante. Mais surtout,
il fallait sentir l'autre au travers de son arme. Grâce aux conseils
avisés des différents partenaires, chacun pouvait progresser
dans la sensation de ses propres mouvements. Sensation intérieure
et contrôle d'un sabre rendu invisible par la vitesse. Et que
le son d'un bô fendant l'air est agréable après
une matinée d'efforts ! Pour terminer le cours, chacun se munit
de son arme, bokken pour les débutants, et ken pour les experts,
pour s'exercer au Iaido sous le regard vigilant du sensei. Et après
une séance photo digne d'un magazine de mode (grâce à
Olivier, reporter de premier ordre), ces guerriers accomplis allèrent
déguster un copieux repas (il paraît évident que
vu la petitesse du récit, les repas semblent prendre l'essentiel
du texte. Mais apprécier la vie et les bonnes choses n'est-il
pas le propre d'un bon samouraï ?).
«
L'homme est un être en mouvement. Il est incapable de ne pas bouger.
»
Cette maxime est des plus vérifiables chez ces disciples du Katori
Shinto Ryu. Tous à l'assaut de la falaise, Éric en tête
(vous y croyez sincèrement ?), ils marchèrent pendant
des heures jusqu'au sommet, sous la grêle et contre le vent, luttant
contre des bêtes sans nombre (bon, en vérité, il
y avait un grand soleil, quelques moucherons et une brise rafraîchissante,
le long d'un chemin peu pentu, mais il faut garder le mythe intact pour
les générations à venir). Après un retour
sans encombres (avec un peu d'escalade pour certains, hum...), on retrouva
Éric endormi dans sa voiture, rêvant sans aucun doute de
sport et d'exercices physique. Chacun repartit, toujours en mouvement,
se remémorant en voiture les moments croustillants du week-end
passé, pour regagner la vie quotidienne trépidante et
agitée de la métropole, bloqués un peu sur le périphérique
au son de la quatrième Symphonie de Brahms, jouée par
le fabuleux John Eliot Gardiner (si, si, je vous jure). Ainsi s'acheva
le stage Criel 2011, dont les exploits furent immortalisés par
les photos d'Olivier pour les siècles à venir, du moins
jusqu'à l'année prochaine...