
Janvier,
la dernière ligne droite…
Nous voilà
à nouveau sur le tatami. Les fêtes et les réjouissances
derrières nous, le mois qui débute sera placé
sous le signe du travail (« keiko ! » comment dirait un
certain Maître….) avec au programme des cours supplémentaires
le samedi à IVRY avec Loïc et des révisions avant
le début du cours le mardi avec Eric. Les entraînements
se suivent, les jours et les semaines passent vite, nous rapprochant
rapidement de l’échéance.
A mi chemin, le 1er Kyu de Kobudo m’apparaît comme une
étape. Le plus dur est encore à venir si l’on
en croit les propos de Christian qui, sourire en coin me lance : «
Ce n’est rien par rapport au 1er Dan Aïki, le 1er Kyu Kobudo,
on peut le passer sur une seule jambe…. ». Bizarre, moi
j’ai eu bien besoin des deux !
La
semaine précédente…
Cette semaine,
je me ménage. Il faut être dans de bonnes conditions
physiques pour dimanche, je sèche donc le Kobudo… Les
cours d’Aïki n’en sont pas pour autant plus «
légers ». On axe cette dernière semaine de révision
sur les randoris avec l’aide de Jean-Claude et Didier. Christian,
quand à lui, nous rappelle les éléments qui nous
permettront d’être moins déstabilisés devant
le Jury : déroulement de l’examen, principe de notation,
… Ses propos se veulent rassurants : « Tout ce que vous
devez savoir, vous le savez déjà ! ». Ce n’est
pas le seul à nous encourager, Pascal et moi. Les commentaires
de nos partenaires sont nombreux : « Pour vous ça ne
devrait être qu’une formalité ! », «
On vous fait confiance », « M.r.e ». S’ils
sont parfois taquins : « J – 3 !!! », « T’as
la trouille là hein ?!? » (en version édulcorée…),
c’est toujours dans la bonne humeur qui caractérise le
club.
La
veille…
Après un
bon petit déjeuner, j’attaque les préparatifs
pour demain. Je commence par coudre sur ma veste le Mon du club (j’ai
fini par le retrouver dans mes cartons de déménagement
!). Demain il va falloir être digne de cet écusson !
Ensuite je me mets au repassage, nous avons tous gardé notre
Keikogi le plus neuf, celui orné des emblèmes de notre
école pour demain. Un fois plié, il rejoint le sac avec
d’autres indispensables : spray réfrigérant, pansements,
elasto,….
Loïc appelle afin de fixer le rendez-vous de demain matin pour
aller au Gymnase de Vanves. Il en profite pour m’interdire de
mettre les pieds sur le tatami d’Ivry aujourd’hui, ça
serait trop idiot d’avoir des courbatures le lendemain.
L’après midi est composée d’activités
susceptibles de me faire penser à autre chose que l’Aïki
:.
Le soir venu je m’occupe des derniers préparatifs pour
demain, notamment la confection de la boisson sucrée légèrement
acidulée que m’a conseillée mon préparateur
physique, j’ai nommé Jean-Luc. Rassurez vous, il ne s’agit
que d’eau, de sirop de cassis et de citron. J’ajoute une
bouteille d’eau nature, quelques pâtes de fruits, mes
dernières licences, mon certificat médical, ma convocation
et une pièce d’identité. Voila tout y est je pense
!
Je me change à nouveau les idées en faisant un peu de
bricolage et je finis la journée par un bon plat de pâtes
avant de me mettre au lit. Il est 21h30 et je suis sous la couette…
Le jour J….
6h30, le réveil
sonne. Sur les conseils d’un de mes partenaires du matin, Christophe,
je me lève tôt de manière à ne pas débuter
l’épreuve en pleine digestion. La nuit a été
un peu agitée, klaxon dans la cour de l’immeuble et douleurs
au ventre, mais ce matin je suis plutôt bien réveillé.
Je mange encore une bonne assiette de pâtes en guise de petit
dej’, c’est important les sucres lents ! Je re-vérifie
encore une fois le contenu du sac, je prends une bonne douche dynamisante
et j’attends patiemment l’heure en lisant le programme
TV, histoire d’être sur de ne pas me faire des nœuds
au cerveau, puis me voici parti pour retrouver José, Jean Luc
L., Benjamin et Loïc qui nous conduit tous à Vanves.
Une légère appréhension semble s’emparer
des candidats que nous sommes, peu de mots sont échangés
dans le vestiaire… Sur le tatami, je retrouve Pascal qui est
déjà en train de s’échauffer. La encore
le silence règne. Je regarde si je connais des têtes,
parmi les candidats pour voir qui seront mes partenaires, parmi le
jury également pour avoir une idée de qui vont être
nos examinateurs ce matin. Je commence par courir autour du tatami
histoire de faire chauffer le moteur puis je poursuis avec des étirements.
Au bout d’une dizaine de minutes, un candidat au deuxième
Dan nous propose de continuer l’échauffement en commun.
Très bonne initiative, je me concentre sur ses directives.
Ce deuxième échauffement se termine par quelques Te
hodoki. J’ai tout juste le temps de remettre ma convocation
avant que nous passions au salut.
Daniel Dubreuil préside le jury de la journée. Christian
est à sa gauche, comme d’habitude très concentré.
Après quelques mots d’introduction, Daniel annonce la
répartition des candidats et la composition des jurys. Ceux-ci
se composent de quatre membres. Le premier groupe de candidats sera
composé des cinq prétendants au 2ème Dan, le
second de cinq des neuf 1er Kyus et enfin, Pascal, Benjamin, Christophe
et moi serons notés par un 3ème jury.
Ca y est, c’est parti ! Après avoir rassemblé
nos affaires du coté du tatami qui nous est alloué,
nous nous mettons en seiza devant nos examinateurs pour les saluer.
Notre président de jury nous rappelle qu’il est là
avec ses assistants pour valider notre niveau et qu’il ne s’agit
pas d’un concours ou d’une épreuve, mais de s’assurer
que nous avons bien assimilé le programme. Il nous rappelle
les critères de notation et finit de remplir nos dossiers en
nous posant quelques questions administratives (date de début
de la pratique, est-ce qu’on se présente pour la 1ère
fois, ….). Il nous met à l’aise en nous proposant
de finir de nous échauffer ou de nous détendre les jambes
pendant ce temps.
Le premier contrôle porte sur les Te Hodoki. A chaque fois,
le jury nous demandera d’exécuter chacun notre tour les
dégagements sur les saisies qu’il indique. Quand nous
connaissons plusieurs formes nous les montrons. Cette première
étape se fait sans difficultés particulières,
les Te hodoki faisant partie des mouvements maintes fois répétés.
Nous nous remettons en seiza pendant que nos examinateurs notent leurs
commentaires. A chaque fois ces coupures seront suffisamment longues
pour nous permettre de récupérer un peu, et nous laissent
penser que notre cas est étudié très consciencieusement.
Viennent ensuite les Kihon et d’abord le Kihon Nage. Christophe
et Benjamin le présentent en premier. Durant leur passage,
je jette un œil aux autres groupes qui, eux aussi, exécutent
ce kata. Nos deux camarades d’Ivry semblent plus à l’aise
que les autres 1er Kyus, mais je reste impressionné par le
travail qu’effectue les candidats au 2ème Dan. Mon regard
revient vite sur Benjamin et Christophe. Leur travail est comme d’habitude
de bonne qualité hormis un Koshi Nage un peu raccourci. Le
jury, évidemment, ne s’y pas trompe pas et leur demande
de refaire cette technique. La deuxième fois est la bonne !
Vient le tour de Pascal et moi… Je débute mon kata sans
problème puis soudain, le stress m’envahit ! J’enchaîne
alors les techniques machinalement, sans porter attention à
ce que je fais et je fini mon kata comme un automate. Dans le rôle
de partenaire, je ne suis pas mieux puisque j’arrive même
à me tromper de saisie à un moment. Heureusement Pascal
ne se laisse pas distraire par cette fantaisie.
Place au Kihon Osae. Cette fois je reste concentré et j’effectue
mon kata sans erreurs notoires. Christophe me sert de partenaire et
nous prenons soin de ne pas nous presser dans la réalisation
des techniques. Le Jury a en effet insisté sur le fait qu’il
préférait voir de la précision à de la
vitesse.
Nous voici maintenant arrivés aux techniques, en Chika Ma d’abord,
puis en Ma. Trois techniques nous sont demandées pour chacune
des distances. Parfois le jury nous demande de faire plus attention
ou d’être plus démonstratifs sur certains points
: déséquilibre du partenaire sur Ushiro Kata Otoshi,
position ferme lors des dégagements sur jyunte, entrées
plus « en rotation », autres formes sur certaines techniques…Nous
prenons comptes des remarques du jury qui nous les formule positivement
: Il ne s’agit pas de reproches ou de commentaires désagréables,
mais bien de questions nous permettant de combler certaines lacune
de notre présentation initiale.
Cette partie terminée, nous enchaînons avec les katas
complémentaires. Puisque nous sommes quatre (donc moins nombreux
que les autres groupes), nos examinateurs nous demandent un kata de
frappe et un de Kenjutsu chacun, tirés au hasard et avec le
partenaire de notre choix. Le hasard fait bien les choses puisque
Benjamin et moi tirons Tsuki Uchi no Kata alors que Pascal et Christophe
exécutent Happo Ken Kata. Ceux qui m’ont vu réaliser
Happo Ken Kata savent que la chance m’a donné un petit
coup de pouce…Le jury demande à la fin à Benjamin
de représenter son kata à un vitesse plus « normale
», preuve encore une fois qu’il nous laisse toute les
chances de montrer notre niveau réel, et en ce qui concerne
celui de Benjamin, il n’y a pas de doutes à avoir. La
partie Kenjutsu s’effectue sans problème : nous pratiquons
tous ou avons pratiqué le Katori Shinto Ryu. J’effectue
Ken no Kata avec Pascal qui en profite pour rajouter un petit Maki
Uchi fantaisiste à la fin. Pendant ce temps, Christophe et
Benjamin présentent Itsutsu no Tachi.
Le kata de formes historiques Daïto Ryu s’effectue également
avec le partenaire de notre choix. Christophe et moi l’effectuons
d’un coté du tatami pendant que nos 2 compères
le déroulent de l’autre coté. Notre présentation
nous semble correcte si l’on fait exception d’une nouvelle
erreur d’attaque de ma part. Eh oui, le kata ne débute
pas par un Tsuki Chudan…
Voila, une bonne partie de l’épreuve est passée.
Le plus physique reste à venir : les randoris. Et puisque nous
sommes moins nombreux que les autres groupes, ce n’est pas deux,
mais trois types de randoris que nous présenterons : Wa no
Seishin, Esquive / Canalisation et enfin Réaliste. A chaque
fois nos trois partenaires porteront les attaques.
Tout d’abord les Wa no Seishin. Je passe en dernier. Je me suis
efforcé de respirer pendant mes attaques (pour ceux qui ne
le savent pas, je suis le spécialiste du randori en apnée…).Mis
à part quelques techniques introduites et autres « re-saisie
», mes camarades ont fait une présentation très
correcte. J’essaye de me concentrer sur mes déplacements
et je m’efforce d’avancer sur mes partenaires afin de
prendre l’initiative des saisies. Je rejoins le bord du tatami
essoufflé mais relativement content de mon randori.
Nous passons ensuite à la partie Esquive / Canalisation. Durant
nos passages respectifs, nous avons droit à quelques remarques
et encouragements du jury « Plus en rotation », «
180 degrés »… Nous essayons de prendre en compte
leurs commentaires. Là encore je me concentre sur l’initiative
et je vais au devant de mes camarades. Fidèle à moi-même
j’en oublie tout de même de respirer convenablement.
Nous finissons l’examen par le randori technique. Les membres
du jury nous demandent de leur faire plaisir, de leur montrer l’ensemble
du programme de 1er dan, de nous exprimer (tout en restant dans les
limites de l’aïkibudo…). Nous abordons donc cette
dernière épreuve sereinement et pour ma part, content
d’en voir le bout… Je n’oublie pas pour autant de
faire le malin comme à mon habitude en collant quelques Do
Gaeshi, Ushiro Hiki Otoshi, pas tout à fait au programme. J’entends
également quelques rires dans mon dos, y compris celui de D.
Dubreuil, quand je lance une belle première attaque téléphonée
à Pascal. Visiblement, je n’ai pas été
très discret. L’effet sucre lent commence à s’estomper,
et même la boisson sucrée acidulée ou les pâtes
de fruits n’y font rien. Heureusement, je ne suis pas le dernier
à présenter ce randori, et c’est avec effort que
je porte mes ultimes attaques sur Christophe. Le « Ayame ! »
final intervient au moment où je porte un Tsuki. Christophe
inscrit le point final avec un magnifique Kote Gaeshi qui m’envoie
voler. Je rate complètement ma réception, le coude sous
les côtes, et je me relève en remerciant le jury d’avoir
mis fin à mes épreuves. Le coté « Merci
Fred j’ai plus besoin de toi ! » de la technique de Christophe
les a fait sourire. Nous finissons dans la bonne humeur.
Après quelques
minutes de réflexion, nos examinateurs nous annoncent les résultats.
Nous sommes reçus tous les quatre. Il nous disent n’avoir
pas hésité et être plutôt contents de leur
matinée. Ils ont été particulièrement
satisfaits de la prestation de Benjamin. Pascal, lui, a brillé
dans les randoris. Nos axes de progression sont passés en revue.
Pour ma part, pas de grandes surprises : Mon Kihon Nage n’a
pas convaincu, je n’ai pas fait assez bouger mon partenaire.
Jouer à l’automate, je m’en doutais, n’est
pas le meilleur moyen d’effectuer un bon kata. Enfin ! Mon stress
n’a pas duré et visiblement je me suis rattrapé
sur le reste de ma présentation. Les commentaires plus généraux
ont un léger air de déjà entendu : Petits bras,
esquives trop « de front », pas assez « en rotation
», jambes raides, pas assez bas sur mes appuis… Tout ceux
qui me regardent travailler savent que ces remarques sont bien sur
bien méritées, à commencer par Christian qui
va vraiment finir par m’appeler « Abraracoursix»
si ça continue.
La
semaine suivante…
C’est fait
! Nous sommes Yudansha ! Christian nous remet nos ceintures noires,
que depuis nous arborons fièrement. Nous avons bossé
dur pour cela mais nous n’avons pas été les seuls.
Nos enseignants, Christian, Jean-Claude, Didier, Jean-Paul et Jean-Luc
y sont pour beaucoup dans notre réussite. Et comme l’a
si bien dit Pascal ce jour là, c’est un véritable
travail de groupe avec les autres Kyu et les Yudansha qui nous a permis
d’atteindre cet objectif. Encore une fois, un grand «
Merci ! » à vous.
Frédéric